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Créé le 15.03.2022

Secteur financier: utiliser ingénieusement l’intelligence artificielle

Qu’il s’agisse de décisions de placement ou de vérification d’escroquerie, l’intelligence artificielle gagne du terrain dans le secteur financier. Jörg Osterrieder, professeur à la ZHAW School of Engineering, nous en présente les défis et opportunités.

Qu’est-ce que l’intelligence artificielle a rendu possible dans le secteur financier?

L’objectif de l’intelligence artificielle est que les ordinateurs exécutent de manière autonome les tâches qui leur sont confiées sur la base d’algorithmes, tout en s’adaptant à des situations inconnues.

Prenons l’exemple de la gestion d’actifs: aujourd’hui, il est possible de prendre des décisions de placement personnalisées, axées sur les besoins individuels des clients et calculées de manière entièrement automatique par des ordinateurs. Auparavant, il s’agissait soit d’un processus très long, ou alors il était remplacé par des solutions standard. Voici un autre exemple venant de la banque d’investissement: l’intelligence artificielle peut déjà y prendre des décisions optimales et automatisées sur la manière et le moment d’exécuter les ordres d’actions. Il y a quelques années encore, la plupart des ordres d’achat et de vente étaient reçus manuellement par téléphone. Théorisé dans les années 1960, le modèle d’évaluation des actifs financiers (Capital Asset Pricing Model), indique le rendement théorique des actions sur la base des données historiques du marché des capitaux, et s’appuyait encore sur une relation linéaire entre un titre individuel et le marché global. Mais notre monde est devenu tout sauf linéaire. Aujourd’hui, grâce à l’intelligence artificielle, nous sommes en mesure de calculer les rendements attendus et les prix des instruments financiers dérivés de manière à intégrer la complexité dans l’équation. Cependant, le calcul ne repose pas sur une équation linéaire, mais sur celle d’une fonction mathématique complexe qui peut comporter des millions de paramètres.

Qu’est-ce qui a fait s’envoler l’intelligence artificielle?

Primo, les données, secundo, les méthodes mathématiques et tertio, les capacités des ordinateurs actuels. Nous n’avons jamais disposé d’une telle quantité de données provenant d’autant de sources différentes, à partir desquelles nous pouvons trouver des corrélations grâce à l’intelligence artificielle. Il y a quelques années, cela n’aurait pas été possible sous cette forme. Alors qu’une capacité d’un  milliard d’opérations de calcul par seconde coûte aujourd’hui environ 4  cents, la même performance coûtait en 1950 l’équivalent de 1800  milliards de dollars.

Quel type de valeur ajoutée le secteur financier pourrait-il tirer des applications de l’intelligence artificielle?

Les banques peuvent tirer parti de l’intelligence artificielle pour réduire les coûts et augmenter les recettes. Elles peuvent par exemple utiliser l’apprentissage automatique dans leur processus de crédit afin d’optimiser les décisions en la matière. L’intelligence artificielle peut identifier des modèles dans les données, qui échappent à l’œil humain – même si le processus n’est pas entièrement automatisé. Cette technologie contribue donc globalement à la compétitivité. 

Quels autres domaines de la banque l’intelligence artificielle anime-t-elle?

Elle concerne tous les domaines bancaires, qu’il s’agisse de la banque de détail, d’investissement, ou de la gestion d’actifs. Et ce, aussi bien dans le front office, où de nouveaux produits et services sont demandés pour les clients, que dans le middle office, où il s’agit par exemple de détecter les fraudes, ou dans le back office, pour automatiser les processus.

Quelles limites à l’intelligence artificielle?

D’une part, l’infrastructure informatique de l’entreprise concernée, qui doit être en mesure de traiter les données, de relier entre elles les bases de données les plus diverses et de fournir la capacité de calcul nécessaire. D’autre part, il faut tenir compte des directives de la protection des données et respecter les exigences réglementaires. Tout ce qui serait possible de faire n’est pas forcément permis. En Suisse et dans de nombreux autres pays, la réglementation prévoit que la manière dont un résultat a été obtenu doit être claire et compréhensible à tout moment. Reprenons l’exemple d’une décision de crédit: si, en tant que client, je veux savoir pourquoi je n’ai pas obtenu un crédit, la banque doit m’exposer de manière plausible comment elle est parvenue à cette décision. Or, si la banque utilise des modèles mathématiques très complexes avec des millions de paramètres pour parvenir à ses décisions de crédit, cela n’est guère possible. Il en va généralement autrement lors de l’utilisation de services de machine learning (apprentissage machine) moins complexes et basés sur des règles, comme Roboadvisory, où les résultats sont généralement compréhensibles.

L’intelligence artificielle deviendra-t-elle un facteur concurrentiel décisif dans le secteur financier?

De nombreuses grandes banques déploient déjà avec réussite l’intelligence artificielle dans de nombreux secteurs. Cette technologie évoluera de telle sorte que chaque entreprise financière devra utiliser certaines fonctionnalités de base pour rester compétitive. Une infrastructure informatique efficace est incontournable, mais toutes les banques n’ont pas forcément à endosser un rôle de pionnier ici.

Quels sont les thèmes de recherche que vous abordez actuellement dans le domaine de l’intelligence artificielle?

Mon équipe et moi-même participons à différents projets de recherche financés aussi bien par le Fonds national suisse, Innosuisse et l’Union européenne que par l’industrie financière. Les thèmes abordés vont des modèles de risque de crédit dans le prêt entre particuliers (peer-to-peer lending) à la détection des fraudes dans les paiements par la blockchain, en passant par les décisions de trading optimales. Nous travaillons également à rendre compréhensibles les modèles complexes de l’intelligence artificielle. On parle alors d’intelligence artificielle explicable comme d’un ensemble de processus et de méthodes permettant aux utilisateurs humains de comprendre et de suivre les résultats et les émissions générés par les algorithmes d’apprentissage automatique. Un autre domaine de recherche passionnant est ce que l’on appelle l’apprentissage par renforcement (reinforcement learning), dans lequel l’ordinateur prend lui-même des décisions optimales dans un environnement complexe. L’ordinateur peut effectuer des millions de simulations afin d’évoluer en permanence.

Et quel est le domaine d’application dans le secteur financier?

Par exemple la banque d’investissement. En tant qu’acteurs du marché financier, les banquiers d’investissement sont chaque jour en concurrence avec d’autres acteurs du marché financier pour prendre des décisions d’achat et de vente. Dans nos projets de recherche, nous examinons comment nous utiliser le reinforcement learning pour prendre des décisions de trading de manière optimale et automatisée. Contrairement aux échecs, par exemple, qui se déroule dans le cadre de règles claires, les marchés financiers sont extrêmement complexes. Il y a beaucoup d’événements incertains et aléatoires qui jouent un rôle, ce qu’on appelle un rapport bruit/signal élevé.

Et comment apprendre à l’ordinateur à devenir un courtier en bourse performant?

Nous fixons à l’ordinateur l’objectif de réaliser un maximum de bénéfices à la fin de la journée et lui faisons analyser un nombre incroyablement élevé de variantes. Il achète et vend d’abord au hasard, puis optimise son comportement en fonction des bénéfices réalisés au terme de la journée. Comme il est loin d’être possible de calculer toutes les possibilités malgré la puissance de calcul considérable disponible, il faut ici des procédés mathématiques sophistiqués pour trouver une solution.

L’intelligence artificielle chez PostFinance

Chez PostFinance, l’intelligence artificielle est une question importante. Les trois articles de blog suivants donnent un aperçu de la manière dont PostFinance utilise l’intelligence artificielle pour automatiser ingénieusement les tâches et les services. Ici, il s’agit d’opérer une distinction entrel’intelligence artificielle «faible» et l’intelligence artificielle «forte».

Jörg Osterrieder

Professeur à la ZHAW en Finance and Risk Modelling, Jörg Osterrieder étudie l’analyse des données, la blockchain et l’intelligence artificielle. Il a auparavant exercé diverses fonctions au sein de banques d’investissement internationales et de hedge funds. Ses projets de recherche sont axés sur l’industrie financière, avec des analyses quantitatives reposant sur les données. Son expertise est très recherchée au niveau international. 

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