Les effets économiques de la crise du coronavirus vont se faire sentir pendant longtemps encore. De nombreuses entreprises – surtout les petites – luttent pour leur survie et se demandent comment payer les frais courants. Dans un tel contexte, il paraît absurde, au premier abord, de réfléchir à une prochaine étape de croissance. Toutefois, en y regardant de plus près, la décision peut s’avérer judicieuse dans la mesure où l’on n’envisage pas la croissance uniquement en termes quantitatifs, mais également sous l’angle qualitatif. Oliver Wegner, qui soutient les entreprises dans leurs étapes de croissance en sa qualité de consultant, nous explique comment enregistrer une croissance saine également ou précisément maintenant.

Monsieur Wegner, que signifie véritablement la notion de croissance?

Pour les entreprises, la croissance est une garantie d’avenir. C’est pour cette raison que chaque chef d’entreprise et chaque entreprise ont pour tâche principale de créer et de gérer une croissance saine, notamment en temps de crise et à l’issue d’une crise. Aujourd’hui, on associe généralement la croissance à une augmentation du chiffre d’affaires ou du bénéfice. Or, en plus de ces paramètres externes de croissance, il existe également des paramètres internes de croissance tels que les compétences de l’entreprise, sa capacité d’innovation ou encore sa culture (voir le menu déroulant). Croître ne signifie donc pas seulement aller «plus haut, plus vite et plus loin», mais aussi faire «mieux, autrement, différemment». Il vous faudra tenir compte de ces paramètres pour assurer une croissance saine de votre entreprise, sachant qu’il ne peut y avoir une croissance saine que de l’intérieur vers l’extérieur. 

Qu’est-ce que cela signifie pour les entreprises qui sont en mauvaise posture à cause de la crise?

Pour des raisons externes, vous faites face de manière inattendue à une diminution de votre chiffre d’affaires et de votre produit. Vous vous trouvez ainsi en phase de croissance restreinte (voir schéma): les paramètres externes de croissance sont négatifs et les paramètres internes sont positifs (dans le meilleur des cas). Reste à savoir comment redresser la barre. Peut-être que les commandes vont revenir au même niveau qu’avant et que la situation va se détendre. Mais peut-être aussi que le contexte a été bouleversé au point que le retour à la situation initiale est semé d’embûches, voire impossible compte tenu de l’ancien modèle commercial. Quel que soit le cas de figure qui se présente, mon conseil est de se pencher sans tarder sur les tenants et aboutissants d’une croissance saine et de se poser les questions suivantes: à l’avenir, comment pouvons-nous nous démarquer encore davantage de nos concurrents? Quelle est la caractéristique qui nous distingue en termes d’exclusivité et comment pouvons-nous l’exploiter de manière encore plus efficace? En effet, la croissance n’est pas soumise au droit de vote: chaque entreprise est présente sur un terrain de jeu face à d’autres concurrents et doit redéfinir régulièrement sa position, car l’environnement évolue en permanence et toujours plus rapidement.

Le quadrant de la croissance: la croissance, dépendante de paramètres internes et externes

^{Source: oliverwegner.com}

On constate dans de nombreux cas un chiffre d’affaires et un produit en recul malgré des conditions internes favorables. De nombreuses entreprises se trouvent donc dans une phase de croissance restreinte.

Comment y parvenir?

Le chef d’entreprise et son équipe devraient se demander ensemble quel problème ils souhaitent résoudre pour leur clientèle et de quelle manière. Où sont leurs véritables atouts et où se situent les besoins de leurs clients? Car sous nos latitudes, la grande majorité des clients cherchent à «éviter la douleur», tant dans le domaine B2B que B2C. Autrement dit, ils achètent un produit ou une prestation uniquement lorsqu’ils ont vraiment un problème grave. Prenons l’exemple d’un garage automobile: en tant que client, je ne souhaite pas tomber en panne quand je suis en vacances. Je cherche donc à temps le service correspondant. Pour le garage automobile, l’objectif consiste non seulement à fournir ce service, mais aussi à procurer un bon sentiment au client durant tout le processus de traitement de sa demande. Cela n’entraîne pas de coûts supplémentaires pour le garage. Il s’agit principalement d’une attitude, d’une compétence en termes de services et d’une offre visible à l’extérieur qui ont pour effet que les clients reviennent, recommandent le garage et sont disposés, comme l’expérience le montre, à débourser un peu plus. Cet exemple met en évidence qu’il est important de veiller à une bonne interaction entre paramètres internes et paramètres externes.

Quel risque prend-on lorsque l’on néglige les paramètres internes de croissance?

Si une évolution est portée de l’extérieur vers l’intérieur, la croissance est souvent imposée et n’est pas défendue avec conviction. Il se peut alors qu’elle se conduise comme un «corps étranger». C’est pour cette raison qu’il est important de connaître ou de développer ses propres performances et de simuler au préalable la future interaction en cas d’ajout de secteurs d’activités (p. ex. au travers de coopérations ou de rachats d’entreprises).

Pour résumer: comment parvenir à une croissance saine?

Il est essentiel de réaliser un bilan de la situation, idéalement en se fondant sur le quadrant de la croissance. Si mon entreprise se trouve actuellement en phase de croissance restreinte, il est relativement facile d’intervenir, car il faut alors uniquement activer les potentiels qui ne sont pas encore exploités intégralement. Souvent, il est important d’augmenter sa visibilité auprès du groupe de clients que l’on vise. Si une entreprise traverse une phase de croissance malsaine, la réponse se trouve elle aussi en interne, auprès d’un ou de plusieurs paramètres internes de croissance qui ne tiennent pas leur cap. Dans ce cas, il est impératif d’agir vite car la croissance malsaine est sournoise: les paramètres externes sont encore au vert alors que l’entreprise présente déjà un problème en interne.